La digitalisation du marché secondaire

Alice Hababou

Ce qui fait la valeur d’une société, c’est la liquidité qu’elle procure aux associés et à ses investisseurs. Aujourd’hui, la liquidité est gérée par les entrepreneurs, fondateurs de sociétés. L’administration de la liquidité est compliquée au regard des exigences juridiques et administratives du processus, mais également face aux préoccupations des transactions financières qui doivent être concomitantes à la mise à jour du registre de mouvements de titres des actionnaires. Sans oublier qu’en amont, les informations sur la société doivent être suffisamment exhaustives pour déterminer le prix des cessions à transmettre aux repreneurs. Mais lesquels ? Cela fait 30 ans que les acteurs de l’économie sont dans l’attente d’une place de marché digitale pour simplifier toutes les étapes de ce processus de gestion de la liquidité des entreprises. Nous y sommes. 

Le marché secondaire est une interface permettant à des investisseurs de revendre leurs titres financiers. Il recense les offres de cession de titres financiers de gré-à-gré. Ces derniers peuvent être dorénavant digitalisés sur un dispositif d’enregistrement électronique partagé (nommé “DEEP”)[1], tel que la blockchain au sens de l’article L.211-3 du Code monétaire et financier.

Du côté de la gestion administrative et juridique de la cession de titres financiers, des avancées législatives sont visibles notamment au regard de la tokenisation d’instruments financiers sur blockchain qui se démocratise considérablement en France et à l’international. Depuis l’ordonnance blockchain du 8 décembre 2017[2] complétée par son décret d’application du 24 décembre 2018[3], la digitalisation du registre de mouvements de titres des sociétés et la livraison des titres numérisés contre paiement sont désormais possibles pour les titres financiers non cotés. Qu’en est-il de la création d’une place de marché digitalisée pour permettre aux investisseurs et aux actionnaires une meilleure prise de contact ?  

Après une introduction du contexte législatif de l’édification d’un marché secondaire de titres financiers digitaux non cotés (1), il s’agira de décrire le fonctionnement simplifié du marché secondaire sur Equisafe (2). 


1. Le contexte législatif français d’édification de marchés secondaires de titres financiers digitaux non cotés

  • Les difficultés du marché secondaire des titres financiers digitaux non cotés

L’échange de titres non cotés dématérialisés consiste en la réception et la transmission d’ordres, mais également l’exécution de ces ordres d’émission et de distribution de ces titres à des investisseurs de façon numérisée. Le développement de marchés secondaires permettant ces échanges sur des plateformes digitales est limité par l’encadrement strict de la législation française. En effet, la Directive MIF2[4] préconise des agréments spécifiques de prestataires de services d’investissement (PSI) ou d’entreprise de marché pour l’exploitation de système multilatéral de négociations permettant l’interaction de multiples intérêts acheteurs et vendeurs lors de la cession et l’acquisition d’instruments financiers[5]. La notion de système multilatéral est délibérément très vaste, comprenant en ce sens l’expression d’intérêts acheteurs et vendeurs (qui s’entend au sens large comme incluant les ordres, prix et indications d’intérêts[6]).

La directive MIF sur les marchés d’instruments financiers négociés sur des plateformes de négociations[7] prévoit également une obligation d’inscription en compte auprès d’un dépositaire central de titres (un gestionnaire identifié et centralisé). Cette obligation constitue un obstacle au développement de marchés secondaires de titres financiers non cotés sur blockchain qui, dans son essence, constitue une plateforme décentralisée. 

  • Les tableaux d’affichage comme régime dérogatoire à la plateforme de négociation

Le règlement sur les marchés d’instruments financiers (MiFIR) prévoit le recours possible aux tableaux d’affichage pour certaines plateformes d’échanges de titres financiers inscrits en DEEP. L’Autorité des marchés financiers précise que si l’outil permet une publicité seule des titres financiers à vendre sur le marché secondaire, y compris éventuellement les prix et les quantités disponibles des titres, toutes négociations et conclusions de ces transactions doivent s’effectuer en dehors de la plateforme d’affichage[9], sous le risque d’être requalifié en système multilatéral de négociations. 

Si ce deuxième régime permet une dérogation aux règles strictes des plateformes de négociation, en pratique, il est difficile à mettre en place pour les plateformes qui fondent leurs services sur la blockchain. De plus, les tableaux d’affichage sont très limités dès lors que les acheteurs et vendeurs doivent se contacter, négocier, conclure ou exécuter la transaction de manière bilatérale et hors de la plateforme[10]

Face à ces vulnérabilités de ces plateformes centralisées, des plateformes décentralisées de titres financiers numériques telles qu’Equisafe se sont développées. 


2. Un marché secondaire digitalisé sur Equisafe

  • Le fonctionnement de la plateforme Equisafe 

La plateforme Equisafe a vocation à être utilisée par les sociétés émettrices de titres financiers ( “Société”), souhaitant inscrire leurs titres et tenir leur registre de mouvement de titres en DEEP. La solution est également adoptée par les détenteurs de titres émis (“Détenteur”) qui souhaitent visualiser et gérer leurs différents investissements sur la plateforme. Enfin, la plateforme sert également aux investisseurs qui veulent acheter sur la plateforme des titres proposés par les détenteurs (“Investisseur”). 

Equisafe a pour objectif de venir en soutien des Détenteurs pour leur faciliter la vente de leurs titres, en donnant accès aux offres de vente directement aux Investisseurs et en assistant l’ensemble de ces acteurs dans les formalités opérationnelles et juridiques liées aux cessions. Le marché secondaire d’Equisafe fonctionne en trois étapes. 

Tout commence par une proposition de titre à la vente sur la plateforme, avec l’accord préalable de la société émettrice qui agit en apposant sur la plateforme des restrictions conformément à ses statuts ou au pacte d’associés. Une fois l’accord de la société pour la revente des titres sur la plateforme Equisafe, tout détenteur peut placer un ou plusieurs ordres de vente de ses titres sur le marché secondaire d’Equisafe. Les ordres de vente seront présentés aux investisseurs de manière distincte et ne seront pas agglomérés s’ils sont proposés au même prix.

Lorsqu’un investisseur cliquera sur le bouton “Acheter”, la plateforme est paramétrée pour (i) vérifier automatiquement qu’il satisfait aux restrictions déterminées par la société émettrice et que (ii) son compte en euros, tenu par Lemonway SAS (dont Equisafe est l’agent prestataire de service de paiement) dispose d’un solde suffisant pour payer le prix d’acquisition des titres. Après validation de ces conditions, les fonds sont cantonnés sur un compte séquestre ouvert dans les livres de Lemonway et l’investisseur sera dès lors considéré comme ayant accepté l’offre de vente du détenteur, sous réserve de conditions suspensive de validation par la société (et les autres actionnaires de la société, en cas de présence d’une clause d’agrément ou de préemption dans le pacte d’actionnaires). 

La dernière étape consiste dans la matérialisation de l’exécution de la transaction qui s’effectue par la signature électronique de l’ordre de mouvement de titres par l’investisseur et le détenteur. A compter de cette signature, Lemonway sur instruction d’Equisafe créditera les sommes disposées sur le compte séquestre sur le compte du détenteur cédant et Equisafe en sa qualité de mandataire teneur de registre de la société, réalisera le mouvement de titres en les inscrivant au nom de l’investisseur, pour réaliser le transfert de propriété, celle-ci déclenchée par l’agrément de la société. 

  • La qualification juridique de la plateforme Equisafe

Comme expliqué dans la première partie de ce présent article, la qualification de système multilatéral de négociation est conditionnée par une obligation de négociation des instruments financiers sur la plateforme[11]. Ce système comprend la nécessité pour les intérêts acheteurs et vendeurs “d’interagir” ou de se “rencontrer” et ce, dans un objectif de formation du prix[12]. 

Sur Equisafe, seuls les intérêts vendeurs (en l’occurrence, les offres de vente) sont affichées sur la plateforme et visibles par ses seuls utilisateurs. Pour l’expliquer autrement, la plateforme ne laisse aucune possibilité aux parties de négocier entre elles de la formation du prix. En ce sens, les intérêts de l’acheteur sont inexistants. La plateforme Equisafe ne répond donc pas à la condition essentielle de qualification des systèmes multilatéraux de négociation et ne peut donc être qualifiée comme telle. 

Par ailleurs concernant la qualification de tableau d’affichage, tel qu’utilisé “pour assurer la publicité des intérêts acheteurs et vendeurs”[13], sans négociation, ni conclusion des transactions sur le système, ne peut être applicable à la plateforme. En effet, Equisafe ne permet pas l’affichage, la publicité ni la diffusion d’intérêts acheteurs. En conclusion, la plateforme Equisafe n’entre pas dans le champ d’application de cette notion.

En conclusion, l’innovation de la solution Equisafe permet de simplifier et faciliter l’accès à un marché secondaire de titres non cotés. La plateforme ne s’inscrivant dans aucun champ d’application de structures législatives en constante évolution, répond néanmoins au besoin essentiel des dirigeants et actionnaires d'aujourd'hui. 


[1] La tokénisation de titres financiers est décrite comme “le procédé de représentation numérique permettant l’enregistrement, la conservation et la transmission d’un actif au sein d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé”. AMF, « Analyse juridique sur l’application de la règlementation financière aux security tokens et précisions sur les tableaux d’affichage », Mars 2020.      

[2] Ordonnanc en° 2017-1674 du 8 décembre 2017 relative à l'utilisation d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers

[3] Décret n° 2018-1226 du 24 décembre 2018 relatif à l'utilisation d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers et pour l'émission et la cession de mini bons

[4] La directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014concernant les marchés d’instruments financiers («Directive MIF 2 »)

[5] Définition du système multilatéral de négociations à l’article L.420-1 du code monétaire et financier “Un système multilatéral est un système ou un dispositif au sein duquel de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers peuvent interagir”.

[6] Considérant7 de MiFIR, le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers («RèglementMiFIR ») ;.

[7] Directive sur les marchés d’instruments financiers (MIF ou MiFID Marketsin Financial Instruments)

[8] considérant8 du règlement MiFIR, le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et duConseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers(«Règlement MiFIR ») ;

[9] noteAMF 03/12/2020 et précisions DOC 2020-02

[10] Rapport sur les titres financiers digitaux (“Security tokens”) du Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris, le 27 novembre 2020 ; p.41

[11] Règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers (« MiFIR»), considérant 7

[12] Cf. le second alinéa de l’article L. 424-1 du CMF : « Le système compte au moins trois membres ou utilisateurs significativement actifs, chacun d'eux ayant la possibilité d'interagir avec tous les autres en matière de formation des prix. »

[13] Considérant 8 de MiFIR

Ce qui fait la valeur d’une société, c’est la liquidité qu’elle procure aux associés et à ses investisseurs. Aujourd’hui, la liquidité est gérée par les entrepreneurs, fondateurs de sociétés. L’administration de la liquidité est compliquée au regard des exigences juridiques et administratives du processus, mais également face aux préoccupations des transactions financières qui doivent être concomitantes à la mise à jour du registre de mouvements de titres des actionnaires. Sans oublier qu’en amont, les informations sur la société doivent être suffisamment exhaustives pour déterminer le prix des cessions à transmettre aux repreneurs. Mais lesquels ? Cela fait 30 ans que les acteurs de l’économie sont dans l’attente d’une place de marché digitale pour simplifier toutes les étapes de ce processus de gestion de la liquidité des entreprises. Nous y sommes. 

Le marché secondaire est une interface permettant à des investisseurs de revendre leurs titres financiers. Il recense les offres de cession de titres financiers de gré-à-gré. Ces derniers peuvent être dorénavant digitalisés sur un dispositif d’enregistrement électronique partagé (nommé “DEEP”)[1], tel que la blockchain au sens de l’article L.211-3 du Code monétaire et financier.

Du côté de la gestion administrative et juridique de la cession de titres financiers, des avancées législatives sont visibles notamment au regard de la tokenisation d’instruments financiers sur blockchain qui se démocratise considérablement en France et à l’international. Depuis l’ordonnance blockchain du 8 décembre 2017[2] complétée par son décret d’application du 24 décembre 2018[3], la digitalisation du registre de mouvements de titres des sociétés et la livraison des titres numérisés contre paiement sont désormais possibles pour les titres financiers non cotés. Qu’en est-il de la création d’une place de marché digitalisée pour permettre aux investisseurs et aux actionnaires une meilleure prise de contact ?  

Après une introduction du contexte législatif de l’édification d’un marché secondaire de titres financiers digitaux non cotés (1), il s’agira de décrire le fonctionnement simplifié du marché secondaire sur Equisafe (2). 


1. Le contexte législatif français d’édification de marchés secondaires de titres financiers digitaux non cotés

  • Les difficultés du marché secondaire des titres financiers digitaux non cotés

L’échange de titres non cotés dématérialisés consiste en la réception et la transmission d’ordres, mais également l’exécution de ces ordres d’émission et de distribution de ces titres à des investisseurs de façon numérisée. Le développement de marchés secondaires permettant ces échanges sur des plateformes digitales est limité par l’encadrement strict de la législation française. En effet, la Directive MIF2[4] préconise des agréments spécifiques de prestataires de services d’investissement (PSI) ou d’entreprise de marché pour l’exploitation de système multilatéral de négociations permettant l’interaction de multiples intérêts acheteurs et vendeurs lors de la cession et l’acquisition d’instruments financiers[5]. La notion de système multilatéral est délibérément très vaste, comprenant en ce sens l’expression d’intérêts acheteurs et vendeurs (qui s’entend au sens large comme incluant les ordres, prix et indications d’intérêts[6]).

La directive MIF sur les marchés d’instruments financiers négociés sur des plateformes de négociations[7] prévoit également une obligation d’inscription en compte auprès d’un dépositaire central de titres (un gestionnaire identifié et centralisé). Cette obligation constitue un obstacle au développement de marchés secondaires de titres financiers non cotés sur blockchain qui, dans son essence, constitue une plateforme décentralisée. 

  • Les tableaux d’affichage comme régime dérogatoire à la plateforme de négociation

Le règlement sur les marchés d’instruments financiers (MiFIR) prévoit le recours possible aux tableaux d’affichage pour certaines plateformes d’échanges de titres financiers inscrits en DEEP. L’Autorité des marchés financiers précise que si l’outil permet une publicité seule des titres financiers à vendre sur le marché secondaire, y compris éventuellement les prix et les quantités disponibles des titres, toutes négociations et conclusions de ces transactions doivent s’effectuer en dehors de la plateforme d’affichage[9], sous le risque d’être requalifié en système multilatéral de négociations. 

Si ce deuxième régime permet une dérogation aux règles strictes des plateformes de négociation, en pratique, il est difficile à mettre en place pour les plateformes qui fondent leurs services sur la blockchain. De plus, les tableaux d’affichage sont très limités dès lors que les acheteurs et vendeurs doivent se contacter, négocier, conclure ou exécuter la transaction de manière bilatérale et hors de la plateforme[10]

Face à ces vulnérabilités de ces plateformes centralisées, des plateformes décentralisées de titres financiers numériques telles qu’Equisafe se sont développées. 


2. Un marché secondaire digitalisé sur Equisafe

  • Le fonctionnement de la plateforme Equisafe 

La plateforme Equisafe a vocation à être utilisée par les sociétés émettrices de titres financiers ( “Société”), souhaitant inscrire leurs titres et tenir leur registre de mouvement de titres en DEEP. La solution est également adoptée par les détenteurs de titres émis (“Détenteur”) qui souhaitent visualiser et gérer leurs différents investissements sur la plateforme. Enfin, la plateforme sert également aux investisseurs qui veulent acheter sur la plateforme des titres proposés par les détenteurs (“Investisseur”). 

Equisafe a pour objectif de venir en soutien des Détenteurs pour leur faciliter la vente de leurs titres, en donnant accès aux offres de vente directement aux Investisseurs et en assistant l’ensemble de ces acteurs dans les formalités opérationnelles et juridiques liées aux cessions. Le marché secondaire d’Equisafe fonctionne en trois étapes. 

Tout commence par une proposition de titre à la vente sur la plateforme, avec l’accord préalable de la société émettrice qui agit en apposant sur la plateforme des restrictions conformément à ses statuts ou au pacte d’associés. Une fois l’accord de la société pour la revente des titres sur la plateforme Equisafe, tout détenteur peut placer un ou plusieurs ordres de vente de ses titres sur le marché secondaire d’Equisafe. Les ordres de vente seront présentés aux investisseurs de manière distincte et ne seront pas agglomérés s’ils sont proposés au même prix.

Lorsqu’un investisseur cliquera sur le bouton “Acheter”, la plateforme est paramétrée pour (i) vérifier automatiquement qu’il satisfait aux restrictions déterminées par la société émettrice et que (ii) son compte en euros, tenu par Lemonway SAS (dont Equisafe est l’agent prestataire de service de paiement) dispose d’un solde suffisant pour payer le prix d’acquisition des titres. Après validation de ces conditions, les fonds sont cantonnés sur un compte séquestre ouvert dans les livres de Lemonway et l’investisseur sera dès lors considéré comme ayant accepté l’offre de vente du détenteur, sous réserve de conditions suspensive de validation par la société (et les autres actionnaires de la société, en cas de présence d’une clause d’agrément ou de préemption dans le pacte d’actionnaires). 

La dernière étape consiste dans la matérialisation de l’exécution de la transaction qui s’effectue par la signature électronique de l’ordre de mouvement de titres par l’investisseur et le détenteur. A compter de cette signature, Lemonway sur instruction d’Equisafe créditera les sommes disposées sur le compte séquestre sur le compte du détenteur cédant et Equisafe en sa qualité de mandataire teneur de registre de la société, réalisera le mouvement de titres en les inscrivant au nom de l’investisseur, pour réaliser le transfert de propriété, celle-ci déclenchée par l’agrément de la société. 

  • La qualification juridique de la plateforme Equisafe

Comme expliqué dans la première partie de ce présent article, la qualification de système multilatéral de négociation est conditionnée par une obligation de négociation des instruments financiers sur la plateforme[11]. Ce système comprend la nécessité pour les intérêts acheteurs et vendeurs “d’interagir” ou de se “rencontrer” et ce, dans un objectif de formation du prix[12]. 

Sur Equisafe, seuls les intérêts vendeurs (en l’occurrence, les offres de vente) sont affichées sur la plateforme et visibles par ses seuls utilisateurs. Pour l’expliquer autrement, la plateforme ne laisse aucune possibilité aux parties de négocier entre elles de la formation du prix. En ce sens, les intérêts de l’acheteur sont inexistants. La plateforme Equisafe ne répond donc pas à la condition essentielle de qualification des systèmes multilatéraux de négociation et ne peut donc être qualifiée comme telle. 

Par ailleurs concernant la qualification de tableau d’affichage, tel qu’utilisé “pour assurer la publicité des intérêts acheteurs et vendeurs”[13], sans négociation, ni conclusion des transactions sur le système, ne peut être applicable à la plateforme. En effet, Equisafe ne permet pas l’affichage, la publicité ni la diffusion d’intérêts acheteurs. En conclusion, la plateforme Equisafe n’entre pas dans le champ d’application de cette notion.

En conclusion, l’innovation de la solution Equisafe permet de simplifier et faciliter l’accès à un marché secondaire de titres non cotés. La plateforme ne s’inscrivant dans aucun champ d’application de structures législatives en constante évolution, répond néanmoins au besoin essentiel des dirigeants et actionnaires d'aujourd'hui. 


[1] La tokénisation de titres financiers est décrite comme “le procédé de représentation numérique permettant l’enregistrement, la conservation et la transmission d’un actif au sein d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé”. AMF, « Analyse juridique sur l’application de la règlementation financière aux security tokens et précisions sur les tableaux d’affichage », Mars 2020.      

[2] Ordonnanc en° 2017-1674 du 8 décembre 2017 relative à l'utilisation d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers

[3] Décret n° 2018-1226 du 24 décembre 2018 relatif à l'utilisation d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers et pour l'émission et la cession de mini bons

[4] La directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014concernant les marchés d’instruments financiers («Directive MIF 2 »)

[5] Définition du système multilatéral de négociations à l’article L.420-1 du code monétaire et financier “Un système multilatéral est un système ou un dispositif au sein duquel de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers peuvent interagir”.

[6] Considérant7 de MiFIR, le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers («RèglementMiFIR ») ;.

[7] Directive sur les marchés d’instruments financiers (MIF ou MiFID Marketsin Financial Instruments)

[8] considérant8 du règlement MiFIR, le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et duConseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers(«Règlement MiFIR ») ;

[9] noteAMF 03/12/2020 et précisions DOC 2020-02

[10] Rapport sur les titres financiers digitaux (“Security tokens”) du Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris, le 27 novembre 2020 ; p.41

[11] Règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers (« MiFIR»), considérant 7

[12] Cf. le second alinéa de l’article L. 424-1 du CMF : « Le système compte au moins trois membres ou utilisateurs significativement actifs, chacun d'eux ayant la possibilité d'interagir avec tous les autres en matière de formation des prix. »

[13] Considérant 8 de MiFIR